Vol. 146, no 19 — Le 12 septembre 2012

Enregistrement

TR/2012-68 Le 12 septembre 2012

LOI SUR L’EMPLOI, LA CROISSANCE ET LA PROSPÉRITÉ DURABLE

Décret fixant au 20 août 2012 la date d’entrée en vigueur de la section 12 de la loi

C.P. 2012-1020 Le 20 août 2012

Sur recommandation du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et en vertu de l’article 374 de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable, chapitre 19 des Lois du Canada (2012), Son Excellence le Gouverneur général en conseil fixe au 20 août 2012 la date d’entrée en vigueur de la section 12 de cette loi.

NOTE EXPLICATIVE

(Cette note ne fait pas partie du Décret.)

Proposition

Le présent décret vise l’entrée en vigueur de la Loi sur les opérations transfrontalières intégrées de contrôle d’application de la loi, qui figure à la section 12 du projet de loi C-38. Il s’agit d’une loi portant sur la mise en œuvre de certaines dispositions prévues au budget déposé devant le Parlement le 29 mars 2012 et d’autres mesures qui ont reçu la sanction royale le 29 juin 2012 et qui portent sur la création de l’Accord cadre sur les opérations intégrées transfrontalières maritimes d’application de la loi entre le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis, qui a été signé en 2009.

Objectif

Le Décret vise à promulguer cette loi, qui permettrait au Canada de faire entrer en vigueur l’Accord cadre sur les opérations intégrées transfrontalières maritimes d’application de la loi entre le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis. Elle contribuerait également à la mise en œuvre d’opérations transfrontalières maritimes intégrées conformes en matière d’application de la loi (aussi connues sous le nom de Shiprider) dans les eaux communes entre la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et la garde côtière américaine, ainsi que leurs partenaires canadiens et américains responsables de l’application de la loi (par exemple la Police provinciale de l’Ontario, la Sûreté du Québec et la police de l’État de New York).

La mise en œuvre d’opérations transfrontalières maritimes intégrées conformes en matière d’application de la loi est un engagement clé de l’initiative conjointe Par-delà la frontière : une vision commune de la sécurité et de la compétitivité économique à l’intérieur du périmètre entre le Canada et les États-Unis, annoncée par le premier ministre et le président des États-Unis en février 2011. Plus particulièrement, la régularisation des opérations Shiprider avant l’été 2012 est une initiative entreprise dans le cadre du Plan d’action « Par-delà la frontière », annoncé en décembre 2011.

De plus, cette initiative est directement liée au discours du Trône de 2011, qui annonçait que le Canada allait renforcer « notre collaboration en vue de moderniser et défendre notre frontière […] afin d’assurer la circulation libre et sûre des personnes et des biens entre nos deux pays », et le Budget 2012, qui stipule que le Canada va lancer « le Plan d’action sur la sécurité du périmètre et la compétitivité économique […] Ces accords permettront de créer une nouvelle frontière moderne pour le siècle à venir. Le Plan d’action sur la sécurité du périmètre et la compétitivité économique fournit une feuille de route concrète pour accélérer le commerce légitime et les déplacements à la frontière Canada-États-Unis, tout en renforçant la sécurité. »

Contexte

Le Canada et les États-Unis partagent un intérêt commun en ce qui concerne la sécurité de leur frontière commune et s’engagent à augmenter leurs capacités d’application de la loi respectives pour détecter et cibler les personnes ou les groupes qui posent une menace à la sûreté ou à la sécurité publique de l’un des pays ou des deux pays, ainsi que pour mener des enquêtes à leur égard, leur interdire le passage et les poursuivre.

Les autorités canadiennes et américaines responsables de l’application de la loi continuent de déterminer les lacunes et les vulnérabilités en matière de sécurité et de services de police le long de la frontière internationale de 8 891 km entre les deux pays. Celles-ci sont en partie attribuables au fait que les organisations criminelles ne sont pas contraintes à des limites territoriales et qu’elles cherchent à exploiter ces lacunes aux frontières internationales à des fins illicites.

De récentes évaluations de la menace effectuées par des organismes canadiens et américains responsables de l’application de la loi, comme l’Évaluation des menaces 2011 des équipes intégrées de la police des frontières canado-américaines et l’Évaluation conjointe des menaces et des risques à la frontière entre les États-Unis et le Canada, considèrent le crime organisé comme la principale menace à la frontière commune. Les activités criminelles comprennent une quantité d’activités de contrebande parmi lesquelles on compte le trafic de drogues illicites, de tabac et d’armes à feu ainsi que le passage de migrants clandestins.

Les organismes d’application de la loi qui travaillent à la frontière canado-américaine ou près de celle-ci sont de plus en plus appelés à intervenir dans le cadre d’activités criminelles qui s’étendent au-delà de leurs frontières nationales respectives et à mener des enquêtes sur ces dernières. Les enquêtes transfrontalières sont entravées par le fait que les agents d’application de la loi ne peuvent pas préserver leur statut d’agent de la paix à l’extérieur de leur administration respective. Les groupes criminels organisés sont conscients de ces limites territoriales et les utilisent à leur avantage pour tenter de fuir les autorités et pour éviter les poursuites subséquentes lorsqu’ils sont impliqués dans des activités criminelles transfrontalières.

Le concept d’opérations transfrontalières maritimes intégrées de contrôle d’application de la loi constitue un écart marqué par rapport à l’approche de partenariat coopératif existante et traditionnelle en matière d’activités d’application de la loi à la frontière. Orientés par des principes établis d’un commun accord (c’est-à-dire respect de la souveraineté et de la primauté du droit des deux pays, réciprocité, gouvernance, surveillance et reddition de comptes conjointes), des agents d’application de la loi canadiens et américains désignés ayant reçu une formation particulière et travaillant au sein d’équipes intégrées seront autorisés à appliquer la loi dans les eaux communes. Ces équipes intégrées, qui collaboreront, pourront aller et venir d’un côté et de l’autre de la frontière pour lutter contre la criminalité transfrontalière. Toutes les opérations seront menées sous la direction et le contrôle des agents d’application de la loi du pays hôte, seront assujetties aux lois nationales en vigueur dans le pays hôte et seront appuyées par des agents d’application de la loi du pays visiteur. Par exemple, lorsqu’une équipe intégrée devra mener des opérations dans les eaux canadiennes, les agents américains devront travailler sous la direction de l’agent canadien à bord du navire. La situation inverse se produira lorsque des équipes intégrées devront mener des opérations en sol américain.

Pour mettre à l’essai le concept d’opérations intégrées, le Canada et les États-Unis ont autorisé la mise en œuvre de deux projets pilotes Shiprider entre la GRC et la garde côtière américaine en 2005, à Windsor/Détroit, et en 2007, à Vancouver/Blaine et à Cornwall/Massena. Ces projets pilotes ont été mis en œuvre pour aider à évaluer le bien-fondé et la viabilité des opérations transfrontalières maritimes intégrées de contrôle d’application de la loi.

Des évaluations conjointes des projets pilotes Shiprider ont confirmé que les opérations transfrontalières maritimes intégrées de contrôle d’application de la loi ont permis de créer un multiplicateur de force et d’accroître la flexibilité opérationnelle des agents d’application de la loi canadiens et américains en leur permettant de mener des activités transfrontalières d’application de la loi continues et uniformes. Cette approche a contribué à une meilleure utilisation des ressources existantes et a fourni une posture de sécurité accrue le long de la frontière maritime en améliorant la détection des criminels et la tenue d’enquêtes à leur égard, ainsi qu’en les empêchant de mener leurs activités dans les eaux communes.

En somme, les projets pilotes Shiprider ont eu une incidence concrète sur les activités criminelles transfrontalières et ont permis de faire en sorte que la frontière ne constitue plus un obstacle pour rendre des services de police frontaliers efficaces. À titre d’exemple, pendant le projet pilote de 2007 à Cornwall/ Massena, les agents de la GRC et de la garde côtière américaine ont participé à plus de 187 embarquements et ont effectué plus de 1 200 heures de patrouille, ce qui représente une augmentation substantielle par rapport à l’exercice de 2005. Ces opérations étaient directement liées à plusieurs mesures d’interdiction, notamment la saisie de 215 livres de marihuana, équivalant à 330 000 $ US, par le Service de police des Mohawks d’Akwesasne, ainsi que la saisie de 1 420 000 cigarettes de contrebande (2 035 $ en devises canadiennes) et de navires et de véhicules d’une valeur approximative totale de 75 000 $. Dans 39 incidents distincts, ces équipes ont contribué à 41 arrestations, dont 6 ont été effectuées directement par les équipes maritimes intégrées. Compte tenu de leur compétence à mener des opérations d’application de la loi sur les deux rives du Saint-Laurent, les équipes maritimes intégrées ont aussi contribué au retour d’un enfant enlevé dans la région de Cornwall. Sur la côte Ouest, les agents de la GRC et de la garde côtière américaine ont signalé 27 manquements à la sécurité et ont détenu deux individus qui ont été placés sous la garde du bureau du shérif du comté concerné, parce qu’ils étaient soupçonnés de conduite en état d’ébriété, ainsi qu’un individu qui était accusé d’avoir commis des manquements graves liés à la pêche commerciale illégale.

En fonction des résultats des projets pilotes, le gouvernement a approuvé, en novembre 2007, le mandat du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, de Sécurité publique Canada et du ministère de la Justice Canada de négocier un accord cadre avec les États-Unis afin de régir la mise en œuvre des opérations régulières Shiprider. Les négociations ont abouti au début du printemps 2009, et l’accord cadre Shiprider a été signé par le ministre de la Sécurité publique et la secrétaire de la sécurité intérieure des États-Unis en mai 2009.

Le projet de loi a été déposé devant le Parlement dans le cadre de la Loi d’exécution du budget le 27 avril 2012 et a reçu la sanction royale le 29 juin 2012 afin de permettre la mise en œuvre des opérations Shiprider à l’été 2012.

Répercussions

Les opérations Shiprider auront des répercussions opérationnelles et juridiques sur certains organismes fédéraux clés, plus particulièrement la GRC, puisque le commissaire sera considéré comme l’autorité centrale responsable de la gestion des opérations transfrontalières intégrées de contrôle d’application de la loi. Les opérations auront également une incidence sur le Service des poursuites pénales du Canada (par exemple les poursuites pour des infractions prévues à des lois et règlements fédéraux autres que le Code criminel et de certaines infractions en vertu du Code criminel, et fonction consultative permanente en matière d’application de la loi à propos de problèmes liés à des poursuites).

Même s’il est de la responsabilité première des procureurs généraux des provinces de mener des poursuites relativement à des infractions au Code criminel, on ne s’attend pas à ce que les poursuites menées dans le cadre des opérations Shiprider aient une incidence majeure sur les poursuites provinciales (par exemple le nombre de cas). On prévoit plutôt que la majorité des poursuites menées dans le cadre de telles opérations seront du ressort du procureur général du Canada, soit parce que les infractions plus susceptibles de faire l’objet d’une enquête sont régies par des lois fédérales autres que le Code criminel (par exemple la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, la Loi sur les douanes, la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, la Loi sur l’accise), soit parce que le Code criminel prévoit expressément une compétence partagée en ce qui concerne ces infractions (par exemple l'importation et l'exportation d’armes à feu, les activités terroristes, les organisations criminelles).

Les opérations régulières du programme Shiprider pourraient entraîner un questionnement de la part du public relativement à l’érosion perçue de la souveraineté canadienne. Les risques sont atténués par l’articulation de principes directeurs et d’éléments principaux qui seront des composantes nécessaires à toute opération intégrée. Parmi ces éléments figurent l’obligation que toutes les activités d’application de la loi entreprises au Canada soient conformes aux lois et aux politiques canadiennes et que toutes les opérations transfrontalières intégrées de contrôle d’application de la loi en sol canadien soient menées sous la direction d’un agent d’application de la loi canadien et soient assujetties aux dispositions législatives nationales en matière de surveillance.

Consultation

Des intervenants clés, comme les procureurs généraux des provinces et les ministres responsables des services de police, les associations de police, un certain nombre de représentants d’administrations locales et de groupes autochtones qui se situent très près de la frontière, des organismes de surveillance civile en matière d’application de la loi, l’Association du Barreau canadien, le Barreau du Québec et des associations d’avocats de la défense dans tout le Canada, ont été consultés dans la rédaction du concept d’opérations transfrontalières intégrées de contrôle d’application de la loi au cours de l’exercice 2008-2009. Il y avait consensus général parmi tous les intervenants sur le fait que si les opérations transfrontalières intégrées étaient régularisées, des enjeux tels que la désignation, les pouvoirs et le contrôle, la formation, la mise en application des dispositions législatives nécessaires, les procédures et protocoles établis, l’obligation de rendre compte, les normes de mise en application convenues et l’échange de renseignements devraient en effet être traités dans un accord cadre.

En août 2011, le Groupe de travail Par-delà la frontière a publié un document intitulé Résumé des consultations réalisées auprès des Canadiens concernant la coopération en matière de réglementation entre le Canada et les États-Unis. Bon nombre de demandes de Canadiens individuels exprimaient des préoccupations au sujet des opérations transfrontalières intégrées de contrôle d’application de la loi et portaient expressément sur l’échange d’information, la perte de souveraineté nationale, la protection des libertés civiles et les mécanismes de recours.

D’autres intervenants, comme le Conseil canadien des chefs d’entreprise et le Syndicat des douanes et de l’immigration, ont plaidé en faveur de l’élargissement des partenariats bilatéraux existants en matière d’application de la loi. La Fédération canadienne des municipalités et certaines collectivités et provinces frontalières, telles la Saskatchewan et l’Ontario, ont recommandé un niveau plus élevé de participation des services de police municipaux dans l’élaboration de programmes conjoints d’application de la loi. L’Assemblée des Premières Nations a recommandé que les Premières Nations dans les deux pays participent aux activités transfrontalières d’application de la loi. L’Association canadienne des libertés civiles a plaidé en faveur de la création de protocoles qui interdiraient l’utilisation secondaire d’information obtenue dans le contexte d’une opération transfrontalière d’application de la loi. Le Commissaire à la protection de la vie privée a demandé que les mesures de protection de la vie privée soient appliquées dans le cadre des activités.

Tous les enjeux cernés par les intervenants ont aussi été déterminés par les représentants canadiens avant le début des négociations bilatérales et ils ont été réglés dans l’accord cadre ou la Loi sur les opérations transfrontalières intégrées de contrôle d’application de la loi, ou ils le seront grâce à l’élaboration de procédures opérationnelles normalisées ou à l’élargissement possible du programme dans le futur.

Personne-ressource

Pour obtenir des renseignements supplémentaires, n’hésitez pas à communiquer avec :

Stephen Bolton
Directeur
Division des stratégies d’application de la loi aux frontières
Sécurité publique Canada
Téléphone : 613-991-4245