Décret concernant la saisie de biens situés au Canada (Volga-Dnepr Airlines ou Volga-Dnepr Group) : DORS/2023-120

La Gazette du Canada, Partie II, volume 157, numéro 13

Enregistrement
DORS/2023-120 Le 8 juin 2023

LOI SUR LES MESURES ÉCONOMIQUES SPÉCIALES

Décret concernant la saisie de biens situés au Canada (Volga-Dnepr Airlines ou Volga-Dnepr Group)

C.P. 2023-551 Le 8 juin 2023

Attendu que la gouverneure en conseil juge que les actions de la Fédération de Russie constituent une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales qui entraîne une grave crise internationale;

Attendu que l’aéronef An-124-100-150 construit par Aviastar-SP, dont les numéros d’immatriculation et de série sont respectivement RA-82078 et 9773054559153, est situé à l’aéroport international Lester B. Pearson de Toronto (CYYZ) et qu’il appartient à Volga-Dnepr Airlines ou à Volga-Dnepr Group — une personne qui se trouve en Fédération de Russie —, ou qu’il est détenu ou contrôlé, même indirectement, par elle,

À ces causes, sur recommandation de la ministre des Affaires étrangères et en vertu de l’alinéa 4(1)b)référence a et du paragraphe 4(1.1)référence b de la Loi sur les mesures économiques spécialesréférence c, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil ordonne la saisie de l’aéronef An-124-100-150 construit par Aviastar-SP, dont les numéros d’immatriculation et de série sont respectivement RA-82078 et 9773054559153, qui est situé à l’aéroport international Lester B. Pearson de Toronto (CYYZ) et qui appartient à Volga-Dnepr Airlines ou à Volga-Dnepr Group — ou qui est détenu ou contrôlé, même indirectement, par elle — de façon à ce qu’aucune opération ne puisse être effectuée à l’égard de cet aéronef, sauf par le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, et de façon à ce que le ministre en prenne la possession et le contrôle et qu’il soit autorisé à en assurer la gestion et à effectuer toute opération à son égard.

RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION

(Le présent résumé ne fait pas partie du Décret.)

Enjeux

Veiller à ce que les complices d’un soutien aux régimes qui violent le droit international ne puissent pas profiter de leurs gains illicites ou continuer d’appuyer les violations de ce régime, en mettant en application le régime des sanctions autonomes canadiennes pour saisir des biens appartenant à des personnes désignées.

Contexte

Le 24 février 2022, le président Poutine, sans avoir été provoqué, a ordonné aux forces russes de lancer une invasion complète de l’Ukraine. Cet acte inacceptable constitue une violation flagrante du droit international et de l’ordre international fondé sur des règles. Les attaques ont causé une dévastation généralisée des infrastructures et des biens en Ukraine, ainsi que la mort inutile d’Ukrainiens, notamment de civils. Ces actions poursuivent et accélèrent les mesures violentes prises par la Russie depuis le début de 2014 pour saper la sécurité et la souveraineté de l’Ukraine.

Depuis, pour répondre à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le Canada a imposé un nombre considérable de nouvelles sanctions dans le cadre de la Loi sur les mesures économiques spéciales (LMES). Le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie (le Règlement visant la Russie) comporte un large éventail de mesures, notamment une interdiction d’effectuer des transactions avec les personnes désignées. À ce jour, plus de 1 800 personnes et entités ont été désignées en application de la LMES pour leur soutien au président Poutine et à sa guerre ou pour leur complicité avec ceux-ci. L’interdiction de transactions prévue par le Règlement visant la Russie interdit à toute personne se trouvant au Canada et à tout Canadien se trouvant à l’étranger d’effectuer une transaction sur des biens, peu importe où ils sont situés, et qu’ils soient détenus par une personne inscrite ou au nom de celle-ci, ou de conclure ou de faciliter une transaction ou de fournir un service financier ou connexe en rapport avec une telle transaction. Il est également interdit de mettre des biens à la disposition d’une personne inscrite ou de fournir un service financier à cette personne ou à son profit.

Régime canadien de saisie et de confiscation des biens

Le 23 juin 2022, le Canada a été le premier pays à mettre en œuvre cet engagement du G7 en modifiant la Loi sur les mesures économiques spéciales et la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus pour y inclure les pouvoirs permettant au gouvernement de saisir, de confisquer, d’aliéner et de redistribuer des actifs situés au Canada qui appartiennent à des personnes sanctionnées figurant sur la liste prévue par l’un ou l’autre des règlements canadiens sur les sanctions. Depuis l’adoption de ces modifications législatives, un effort pangouvernemental est en cours pour déterminer et analyser les actifs susceptibles d’être saisis sous ce nouveau régime.

Chaque bien dont la saisie (ou le blocage) et la confiscation sont recommandés est évalué au cas par cas. La confiscation d’actifs nécessite un processus en deux étapes. Premièrement, il faut obtenir un décret du gouverneur en conseil prévu par l’alinéa 4(1)b) de la LMES pour saisir ou bloquer tout bien ciblé appartenant à une personne ou à une entité sanctionnée conformément aux critères énoncés au paragraphe 4(1.1) de la LMES. Deuxièmement, une fois que le bien est saisi ou bloqué, le ministre peut demander à une cour de la province où le bien est situé d’ordonner sa confiscation permanente au profit de l’État. Si la demande de confiscation est acceptée, le produit de sa disposition peut être utilisé pour la reconstruction des États lésés, le rétablissement de la paix et de la sécurité internationales, ainsi que l’indemnisation des victimes, tel qu’énoncé à l’article 5.6 de la LMES.

Les procédures de confiscation ne sont pas automatiques. L’équité procédurale fait partie intégrante de ce nouveau régime et a été un facteur important dans l’élaboration de cette nouvelle mesure. Les modifications législatives prévoient les garanties procédurales suivantes :

Le 19 décembre 2022, le Canada a annoncé qu’un décret avait été fait sous la nouvelle législation, pour la retenue de $26 millions de dollars américains de Granite Capital Holdings Ltd, une société détenue par Roman Abramovich, un oligarque russe sanctionné en vertu du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie. Le nouveau régime est distinct dans le contexte des sanctions internationales, n’a pas été testé, et sera l’objet de défis sur la voie d’une confiscation potentielle, y compris face à des questions liées au droit de la propriété et potentiellement au droit international. Le gouvernement suit les étapes nécessaires de ce nouveau processus complexe et continuera de fournir des mises à jour aux ministères et organismes concernés au long du processus pour saisie et confiscation des biens.

Bien que les alliés aux vues similaires continuent d’étudier leurs options, le Canada est le premier pays à mettre en œuvre cet engagement dans le contexte de sanctions internationales. Les alliés du Canada soutiennent ses efforts à cet égard.

Objectif

  1. Imposer d’autres coûts à la Russie pour son invasion non provoquée et injustifiable de l’Ukraine, notamment par la saisie ou le blocage de biens ciblés appartenant à des personnes sanctionnées, conformément aux déclencheurs énoncés au paragraphe 4(1.1) de la Loi.
  2. Faire clairement comprendre que les complices d’un soutien aux régimes qui violent le droit international ne peuvent plus continuer à en bénéficier.
  3. Utiliser les fonds provenant de la confiscation d’actifs pour indemniser les victimes, rétablir la paix et la sécurité internationales ou reconstruire les États touchés.

Description

En vertu de l’alinéa 4(1)b) de la Loi sur les mesures économiques spéciales, le présent décret demande l’autorisation de saisir un avion situé à l’aéroport Toronto Pearson. Les propriétaires et opérateurs de ce bien sont réputés être Volga-Dnepr Group et sa filiale, Volga-Dnepr Arilines, tous les deux désignés sous le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie.

Élaboration de la réglementation

Consultation

Affaires mondiales Canada discute régulièrement avec les parties prenantes concernées, dont des organisations de la société civile, des centres communautaires et d’autres gouvernements aux vues similaires, concernant l’approche du Canada vis-à-vis l’application des sanctions.

Un comité interministériel présidé par Affaires mondiales Canada et le ministère des Finances a été mis sur pied avec le mandat d’examiner et d’analyser les biens susceptibles d’être saisis au Canada, ainsi que de formuler des recommandations dans le cadre des nouveaux pouvoirs canadiens de confiscation d’actifs. Parmi les autres membres du comité figurent Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC), le ministère de la Justice, Sécurité publique Canada, l’Agence des services frontaliers du Canada, et la Gendarmerie royale du Canada.

En l’espèce, une consultation publique ne serait pas appropriée, compte tenu du risque d’évitement et de l’urgence d’imposer ces mesures en réponse à la violation continue de la paix et de la sécurité internationales en Ukraine.

Obligations relatives aux traités modernes et consultation et mobilisation des Autochtones

Une évaluation initiale a été réalisée et aucune répercussion sur les traités modernes n’a été cernée.

Choix de l’instrument

Un décret pris en vertu de l’alinéa 4(1)b) de la Loi sur les mesures économiques spéciales donnerait l’autorité nécessaire pour saisir l’avion lié à Volga-Dnepr Group et Volga-Dnepr Airlines, et permettra au gouvernement du Canada de demander la confiscation du même bien à un stade ultérieur.

Analyse de la réglementation

Avantages et coûts

Étant donné que les actifs ciblés ne concernent pas les Canadiens ou les personnes vivant au Canada, Affaires mondiales Canada s’attend à ce que ces derniers ne soient pas touchés négativement par la saisie ou la confiscation de ces actifs.

Bien qu’il ne soit pas possible d’estimer en ce moment les coûts totaux associés à la saisie, à la gestion et à l’aliénation de l’actif s’il est confisqué, la SPAC a les autorités nécessaires pour gérer et aliéner les biens saisis et confisqués, conformément à la Loi sur l’administration des biens saisis. Le mandat de sa Direction de la gestion des biens saisis (DGBS) comprend la prestation de services de gestion des biens saisis et d’entreposage sécurisé à tout organisme, ministère ou société d’État fédéral selon le principe du recouvrement des coûts. Tous les coûts associés à la réalisation de ces activités seront absorbés par le gouvernement.

Si une future demande de confiscation en vertu de l’article 5.3 de la LMES est acceptée, la ministre peut verser des montants du compte des produits aux fins de la reconstruction d’un État, du rétablissement de la paix et de la sécurité internationales et/ou de l’indemnisation des victimes, conformément à l’article 5.6. de la LMES. Le Canada est un chef de file mondial dans son soutien aux efforts de reconstruction de l’Ukraine.

Lentille des petites entreprises

Une analyse de la lentille des petites entreprises a conclu que le Décret en question n’aura pas d’impact sur les petites entreprises canadiennes, étant donné que les actifs ciblés ne concernent pas les Canadiens ou les personnes vivant au Canada.

Règle du « un pour un »

La règle du « un pour un » ne s’applique pas au présent décret, car celui-ci n’impose pas de nouveau fardeau administratif aux entreprises.

Coopération et harmonisation en matière de réglementation

Bien que des alliés partageant les mêmes idées continuent d’appuyer l’initiative du Canada et continuent d’explorer des options pour mettre en œuvre l’engagement du G7 de saisir et de confisquer les biens des personnes sanctionnées, le Canada est le premier à mettre en œuvre cet engagement en créant un nouveau régime législatif de confiscation sur la base des sanctions économiques.

Évaluation environnementale stratégique

Le présent décret est peu susceptible d’entraîner d’importants effets environnementaux. Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, un examen préliminaire a permis de conclure qu’une évaluation environnementale stratégique n’est pas requise.

Analyse comparative entre les sexes plus

Étant donné que les actifs ciblés ne concernent qu’une personne figurant sur la liste du Règlement visant la Russie, Affaires mondiales Canada ne prévoit aucune incidence sur l’analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) dans ce dossier.

Justification

Le régime de saisie et de confiscation des biens est entré en vigueur en juin 2022 pour répondre directement à l’invasion de l’Ukraine par la Russie qui a commencé le 24 février 2022 et constitue une violation flagrante de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine selon le droit international. Alors que le nouveau régime de saisie et de confiscation des avoirs s’applique également à tous les règlements sous la Loi sur les mesures économiques spéciales et à la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus, le présent décret vise à imposer un coût économique direct aux oligarques et mandataires russes qui ont profité financièrement de leur soutien au régime du président Poutine.

Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service

Le Décret entre en vigueur à la date de son enregistrement. Affaires mondiales Canada informera le propriétaire du bien des conditions dans lesquelles l’ordonnance a été prise.

Le mécanisme de conformité et d’application de la loi est décrit dans la section Contexte.

Personne-ressource

Pour de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec :

Direction de la coordination de la politique et des opérations relatives aux sanctions
Affaires mondiales Canada
Courriel : sanctions@international.gc.ca