La Gazette du Canada, Partie I, volume 154, numéro 7 : DÉCRETS
Le 15 février 2020
AGENCE DE LA SANTÉ PUBLIQUE DU CANADA
LOI SUR LA MISE EN QUARANTAINE
Décret visant la réduction du risque d’exposition à la maladie respiratoire aigüe 2019–nCoV au Canada
C.P. 2020-59 Le 3 février 2020
Attendu que la gouverneure en conseil est d’avis :
- a) que la Chine est aux prises avec l’apparition d’une maladie transmissible, soit la maladie respiratoire aigüe 2019–nCoV;
- b) que l’introduction ou la propagation de cette maladie présenterait un danger grave et imminent pour la santé publique au Canada;
- c) que l’entrée au Canada des personnes qui ont récemment séjourné en Chine favoriserait l’introduction ou la propagation de la maladie au Canada;
- d) qu’il n’existe aucune autre solution raisonnable permettant de prévenir l’introduction ou la propagation de la maladie au Canada,
À ces causes, sur recommandation de la ministre de la Santé et en vertu de l’article 58 de la Loi sur la mise en quarantaine référence a, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil prend le Décret visant la réduction du risque d’exposition à la maladie respiratoire aigüe 2019–nCoV au Canada, ci-après.
Décret visant la réduction du risque d’exposition à la maladie respiratoire aigüe 2019–nCoV au Canada
Obligations à l’entrée
1 Toute personne qui arrive à la Base des Forces canadiennes Trenton par aéronef, en provenance de la province de Hubei en Chine, avec ou sans escale, est tenue :
- a) de rester à la base durant la plus courte des périodes suivantes :
- (i) une période de quatorze jours commençant le jour de son arrivée,
- (ii) une période se terminant lorsque l’administrateur en chef de la santé publique nommé en vertu du paragraphe 6(1) de la Loi sur l’Agence de la santé publique du Canada détermine que la personne ne présente pas de danger grave pour la santé publique;
- b) de subir, pendant que la personne reste à la base, tout contrôle médical exigé par l’agent de quarantaine.
Non-application — séjour à l’hôpital
2 L’obligation prévue à l’alinéa 1a) ne s’applique pas à la personne :
- a) qui séjourne dans un hôpital à l’extérieur de la base;
- b) qui, lors d’un séjour dans un hôpital à l’extérieur de la base durant cette période :
- (i) soit a fait l’objet d’une ordonnance de santé publique provinciale ou locale qui est incompatible avec l’obligation;
- (ii) soit a reçu un diagnostic de maladie respiratoire aigüe 2019–nCoV.
Non-application — obligation incompatible
3 L’obligation prévue à l’alinéa 1a) ne s’applique pas à une personne si elle est incompatible avec une autre obligation qui lui est imposée sous le régime de la Loi sur la mise en quarantaine.
Pouvoirs et obligations — Loi sur la mise en quarantaine
4 Il est entendu que le présent décret ne porte pas atteinte aux pouvoirs et aux obligations prévus par la Loi sur la mise en quarantaine.
Durée
5 Le présent décret est en vigueur pendant la période commençant le jour de sa prise et se terminant le 31 mars 2020.
NOTE EXPLICATIVE
(La présente note ne fait pas partie du Décret.)
Proposition
Le Décret visant la réduction du risque d’exposition à la maladie respiratoire aiguë 2019–nCoV au Canada a été pris en vertu de l’article 58 de la Loi sur la mise en quarantaine.
Objectif
L’objectif de ce décret est de protéger la santé des voyageurs exposés ainsi que la santé et la sécurité du grand public contre l’épidémie de maladie respiratoire aiguë 2019–nCoV, au moyen d’une surveillance accrue de tous les voyageurs qui arrivent au Canada en provenance de la province du Hubei, en Chine, dans le cadre des mesures prises par le gouvernement du Canada pour ramener les Canadiens au pays.
Contexte
Il y a une épidémie de maladie transmissible dans un pays étranger :
Le 30 janvier 2020, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a déclaré l’épidémie de la nouvelle maladie respiratoire aiguë 2019–nCoV une urgence de santé publique de portée internationale (USPPI). La maladie respiratoire aiguë 2019–nCoV est causée par un nouveau coronavirus pouvant causer de graves maladies. Il fait partie d’une famille de virus comprenant le coronavirus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS-CoV) et le coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS-CoV). Les coronavirus sont principalement responsables d’infections légères des voies respiratoires supérieures : les signes courants d’infection comprennent des symptômes respiratoires, de la fièvre, de la toux, de l’essoufflement et des difficultés respiratoires. Il est désormais clair que le 2019–nCoV peut entraîner de graves maladies et mettre la vie des personnes infectées en danger. Dans les cas plus graves, l’infection peut provoquer une pneumonie, un syndrome respiratoire aigu sévère, une insuffisance rénale et la mort.
L’introduction ou la propagation de la maladie constituerait un risque imminent et grave pour la santé publique au Canada :
Les patients infectés par le nouveau coronavirus (2019–nCoV) présentent des symptômes qui peuvent comprendre de la fièvre, un malaise, une toux sèche, un essoufflement et des lésions pulmonaires. Les données actuelles suggèrent qu’environ 25 % des cas sont de nature grave ou critique. Les personnes âgées et celles dont le système immunitaire est affaibli ou qui ont un problème de santé ont été ciblées comme étant les plus exposées à un risque de maladie grave. Le délai entre l’exposition et l’apparition des symptômes est d’une période actuellement estimée pouvant aller jusqu’à 14 jours, avec une moyenne de 5 jours. Le traitement actuel vise à soulager les symptômes et à traiter les affections médicales connexes. Il n’y a aucun traitement spécifique contre la maladie respiratoire aiguë 2019–nCoV et il n’existe aucun vaccin préventif en ce moment.
Les coronavirus se propagent chez l’homme par l’inhalation de gouttelettes respiratoires infectieuses en suspension dans l’air (notamment lorsqu’une personne infectée tousse ou éternue) ou au contact d’objets ou de surfaces infectés. La transmission interhumaine est la principale force motrice de l’épidémie actuelle de la maladie respiratoire aiguë 2019–nCoV.
L’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) procède à un contrôle renforcé de tous les voyageurs qui ont séjourné dans la province du Hubei, en Chine, au cours des 14 derniers jours. Les voyageurs qui se sentent malades ou qui ne se sentent pas bien font l’objet d’une évaluation des symptômes, notamment la fièvre, la toux et les difficultés respiratoires. Les agents de l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) aident l’ASFC à faire le dépistage et l’évaluation de l’état de santé subséquent, qui comprend la collecte d’informations sur les antécédents de voyage, le risque d’exposition et les signes et symptômes de maladie.
Le nombre de personnes infectées par le nouveau coronavirus (2019–nCoV) continue d’augmenter; 25 pays autres que la Chine continentale ont signalé des cas. La majorité des cas demeure ceux répertoriés dans la province du Hubei, en Chine. En date du 31 janvier 2020, l’OMS rapporte qu’un total de 9 826 cas ont été associés à la maladie respiratoire aiguë 2019–nCoV dans le monde, y compris 213 décès. Certains patients touchés ont déjà réussi à se rétablir et à obtenir leur congé. Cependant, comme la transmission humaine impliquant un grand nombre de personnes est possible, il est important d’atténuer les risques sanitaires associés aux personnes qui ont été en contact direct avec le virus par une intervention et des soins appropriés.
L’entrée au Canada de personnes appartenant à certaines catégories peut entraîner l’introduction ou la propagation de la maladie transmissible au Canada :
Le gouvernement du Canada finit d’organiser le rapatriement de jusqu’à 250 citoyens canadiens qui se sont trouvés pendant une période prolongée dans la province du Hubei, en Chine, laquelle a fait l’objet de restrictions sur les déplacements régionaux appliquées par le Centre chinois pour le contrôle et la prévention des maladies (CCCPM). Vu ces restrictions, ces personnes sont restées au cœur du foyer d’éclosion pendant une période considérable, et plus longtemps que celles qui s’y sont rendues avant l’instauration des cordons sanitaires autour du Wuhan et d’autres régions de la Chine. Le vol rapatriant les citoyens canadiens au Canada comprendra également le personnel (employés et agents contractuels) des autres ministères du gouvernement du Canada qui aurait possiblement été exposé au virus lors des préparatifs pour ce vol.
Le CCCPM prendra des mesures pour dépister l’infection chez les passagers avant de leur permettre de monter dans l’avion. Ces passagers seront aussi examinés par le personnel médical des services de santé des Forces canadiennes avant d’embarquer pour le vol et il veillera sur eux tout au long du vol de 13 heures pour surveiller l’apparition de symptômes respiratoires. Afin de se rendre à Trenton en Ontario, l’appareil devra faire un arrêt de ravitaillement en Colombie-Britannique. Lors de cet arrêt, les passagers seront examinés de nouveau; les passagers qui auront développé des symptômes de la maladie respiratoire aiguë 2019–nCoV lors du vol seront débarqués seulement si un examen médical et traitement sont requis.
Vu le cycle de vie du virus, lorsque les passagers débarqueront au Canada, ils pourraient demeurer asymptomatiques, mais infectés, pendant 2 semaines, puisqu’ils pourraient avoir été exposés au virus immédiatement avant le départ, pendant le dépistage préalable à l’embarquement ou durant le vol. Malgré toutes les précautions déjà prises, un excès de prudence est de mise afin de protéger les Canadiens d’un nouveau virus pouvant causer de graves maladies. Étant donné le risque élevé pour la santé des personnes exposées, il est avisé alors de soigner les Canadiens rapatriés dans un milieu favorable à leur santé, et à leur rétablissement si le virus se développe, pour une période jusqu’à 14 jours, tout en protégeant la population générale contre le virus.
Il n’existe aucune solution de rechange raisonnable pour prévenir l’introduction ou la propagation de la maladie :
En ce qui concerne les voyageurs ayant transité dans les nombreuses régions de la Chine où le risque d’infection est plus faible, des mesures d’isolement volontaire ou de suivi auprès des services locaux de santé publique sont jugées adéquates en ce moment pour le confinement de la maladie. L’isolement volontaire s’est avéré un succès dans un nombre limité de cas au Canada, grâce aux sens du devoir civique et de diligence remarquables de Canadiens revenus au pays envers le reste de la population (par exemple à Toronto, en Ontario) ainsi qu’un suivi des contacts efficace, en plus que le suivi par les autorités locales en santé publique. Or, le rapatriement par avion de Canadiens (jusqu’à 250 voyageurs) est une mesure tout à fait exceptionnelle, vu que les risques potentiels du virus sont mieux connus maintenant des responsables de la santé publique. Les voyageurs qui seront rapatriés ont été isolés dans une zone géographique avec la plus forte concentration de cas pendant une longue période : ils sont donc beaucoup plus susceptibles d’avoir été exposés à la maladie ou de l’avoir contractée par rapport à d’autres personnes en Chine. On sait désormais que le virus est transmissible entre humains, que les populations vulnérables sont plus susceptibles d’être gravement malades, et qu’il n’existe toujours pas de vaccin. Il est dans l’intérêt supérieur de la santé publique canadienne, tant pour les voyageurs que pour le grand public, de mettre ces Canadiens sous supervision médicale et de leur fournir des soins pendant la durée de la période d’incubation.
Conséquences
Principales obligations pour les voyageurs
Le nouveau décret obligera tous les voyageurs rapatriés à rester sous surveillance médicale jusqu’à 14 jours à la base des Forces canadiennes de Trenton (Ontario). Tout au long de la période de surveillance, ces voyageurs seront en observation afin de détecter les signes et les symptômes de la maladie respiratoire aiguë 2019–nCoV. Les voyageurs qui présentent les symptômes de la maladie respiratoire aiguë 2019–nCoV à leur arrivée ou pendant les 14 jours suivants se verront ordonner de se soumettre à un examen médical et recevront, au besoin, un traitement médical adapté.
Le défaut de se conformer au nouveau décret constitue une infraction à l’article 71 de la Loi sur la mise en quarantaine. Les sanctions maximales (sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire) sont une amende pouvant aller jusqu’à 750 000 $ et/ou six mois d’emprisonnement.
Ce nouveau décret fait concorder les objectifs de l’approche du Canada avec ceux de nos homologues dans d’autres pays comme le Royaume-Uni, les États-Unis et l’Australie.
Consultation
En tant que représentant de la province hôte, Santé publique Ontario a été consulté sur le Décret. L’ASPC continuera de collaborer avec les provinces et les territoires dans le cadre de la mise en œuvre du Décret, et de s’attaquer à toute difficulté ou préoccupation à venir.
Personne-ressource au Ministère
George Samiotis
Directeur
Bureau des services de santé à la frontière
Agence de la santé publique du Canada
Téléphone : 343‑542‑6031
Courriel : george.samiotis@canada.ca