Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie : DORS/2021-48

La Gazette du Canada, Partie II, volume 155, numéro 7

Enregistrement
DORS/2021-48 Le 21 mars 2021

LOI SUR LES MESURES ÉCONOMIQUES SPÉCIALES

C.P. 2021-175 Le 21 mars 2021

Attendu que l'administrateur en conseil juge que des violations graves et systématiques des droits de la personne ont été commises en Russie,

À ces causes, sur recommandation du ministre des Affaires étrangères et en vertu des paragraphes 4(1) référence a, (1.1) référence b, (2) et (3) de la Loi sur les mesures économiques spéciales référence c, Son Excellence l'administrateur du gouvernement du Canada en conseil prend le Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie, ci-après.

Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie

Modifications

1 (1) L'article 2 du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie référence 1 est modifié par adjonction, après l'alinéa a), de ce qui suit :

(2) Les alinéas 2c) et d) du même règlement sont remplacés par ce qui suit :

2 L'article 2.1 du même règlement est remplacé par ce qui suit :

Annexes 2 et 3

2.1 Figure sur la liste établie aux annexes 2 ou 3 le nom de personnes à l'égard desquelles le gouverneur en conseil est convaincu, sur recommandation du ministre, qu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'elles appartiennent à une personne visée à l'un des alinéas 2a) à b), qu'elles sont contrôlées par elle ou qu'elles agissent pour son compte.

3 L'article 44 de la partie 1 de l'annexe 1 du même règlement est remplacé par ce qui suit :

4 L'article 50 de la partie 1 de l'annexe 1 du même règlement est remplacé par ce qui suit :

5 L'annexe 1 du même règlement est modifiée par adjonction, après la partie 1, de ce qui suit :

PARTIE 1.1

Particuliers — violations graves des droits de la personne

Antériorité de la prise d'effet

6 Pour l'application de l'alinéa 11(2)a) de la Loi sur les textes réglementaires, le présent règlement prend effet avant sa publication dans la Gazette du Canada.

Entrée en vigueur

7 Le présent règlement entre en vigueur à la date de son enregistrement.

RÉSUMÉ DE L'ÉTUDE D'IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION

(Le présent résumé ne fait pas partie du Règlement.)

Enjeux

Ces derniers mois, la figure de l'opposition russe Alexey Navalny a été attaquée avec un agent chimique, soumise à une procédure judiciaire profondément contestable, et emprisonnée pendant plus de deux ans pour des motifs douteux. Bien que son cas a été particulièrement flagrant et a reçu une attention internationale importante, il n'est pas la seule victime de répression ciblée par l'État russe. C'est un exemple de l'autoritarisme croissant de la Russie, un modèle de comportement distinct par lequel le gouvernement russe a attaqué des personnalités de l'opposition et réprimé la dissidence interne. Les organisations internationales de défense des droits de la personne ont noté que le bilan de la Russie en matière de droits de la personne a continué de se détériorer au cours des dernières années.

La Russie a résisté à tous les appels à entreprendre une enquête sur l'empoisonnement de M. Navalny, et a lancé d'importantes campagnes de désinformation pour détourner l'attention de sa culpabilité. Le gouvernement russe n'a également pas montré de volonté de répondre aux préoccupations soulevées à plusieurs reprises par la communauté internationale sur la situation des droits de la personne dans son ensemble dans ce pays.

Contexte

En août 2020, Alexey Navalny, une figure de l'opposition et critique du Kremlin, a été empoisonné avec un agent neurotoxique de type Novichok, ce qui a été presque mortel et a nécessité des mois de convalescence dans un hôpital allemand. Cette attaque particulièrement effrontée, suivie de son traitement inquiétant par les autorités russes et la répression violente et la détention massive de ses partisans, a mis en évidence le modèle du gouvernement de la Russie de répression interne croissante et de ciblage des voix de l'opposition.

Des preuves significatives de sources ouvertes indiquent clairement que l'attaque contre M. Navalny a été entreprise avec la participation des autorités russes. La Russie continue de nier toute implication dans l'attaque et a activement propagé des récits faux et contradictoires comme autres possibilités. Le gouvernement russe a également refusé tous les appels à une enquête sur l'incident.

À la suite du retour de M. Navalny en Russie le 17 janvier 2021 de son traitement et sa convalescence à Berlin, il a été détenu pour avoir violé les conditions d'une peine de prison avec sursis de 2014. Le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe a noté que le jugement « défie toute crédibilité et contrevient aux obligations internationales de la Russie en matière de droits de l'homme », ajoutant que la condamnation pénale initiale avait été jugée « arbitraire et manifestement déraisonnable » par la Cour européenne des droits de l'homme. M. Navalny a été condamné à deux ans et neuf mois dans une colonie pénitentiaire pour avoir violé les conditions de sa libération conditionnelle lorsqu'il se faisait soigner en Allemagne. Ce verdict a incité des milliers de manifestants à descendre dans la rue pour demander sa libération en janvier 2021. En réponse, les forces de l'ordre russes ont violemment réprimé les manifestations et arrêté plus de 10 000 personnes pour y avoir participé.

M. Navalny n'est pas le seul à avoir été pris pour cible par le régime pour des activités d'opposition. La Russie a une histoire avérée de violations des droits de la personne, de ciblage des opposants et critiques politiques, et de répression de la dissidence interne, parfois avec violence. Les groupes de défense des droits de la personne internationaux et locaux citent des rapports de mauvais traitements commis par les forces de l'ordre et les organes correctionnels, notamment les sévices physiques infligés aux détenus par la police, la torture ou les mauvais traitements sévères infligés aux prisonniers dans les colonies pénitentiaires, et la détention d'individus pour leur association avec des organisations d'opposition.

L'espace de la société civile en Russie a continué de se rétrécir, et les efforts juridiques continuent de cibler les défenseurs des droits de la personne. La situation des militants LGBT en Tchétchénie est particulièrement inquiétante. Comme le décrit en détail un rapport de 2018 préparé sous les auspices de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), les autorités de ce pays ont pratiqué la torture, les disparitions forcées, les exécutions extrajudiciaires, et d'autres violations et abus très graves des droits de la personne contre les membres de la communauté LGBT, les défenseurs des droits de la personne, les avocats, les médias indépendants, et les organisations de la société civile. En mai 2020, le Canada, les États-Unis et 14 États européens ont fait une déclaration à l'OSCE indiquant que les autorités n'avaient pas répondu aux préoccupations soulevées.

Le gouvernement russe utilise également des mesures législatives pour supprimer les voix de l'opposition. En fin décembre 2020, le président Poutine a signé un grand nombre de projets de loi, incluant des restrictions sur les manifestations, l'information en ligne, et sur les individus et les organisations recevant des fonds de sources étrangères pour leurs activités. Les campagnes médiatiques agressives menées par l'État discréditent le travail de la société civile, et les attaques contre les acteurs de la société civile, comme dans les années précédentes, restent fréquentes.

Le gouvernement russe a clairement indiqué qu'il n'était pas disposé à répondre aux préoccupations de la communauté internationale sur ces enjeux. Au début de février 2021, trois diplomates ont été expulsés du pays après avoir observé les réactions publiques au traitement de M. Navalny.

La tentative de meurtre, la condamnation et l'emprisonnement d'Alexey Navalny démontrent le mépris continu du gouvernement russe pour les valeurs de l'État de droit, ainsi que sa volonté de violer les droits de la personne de ses citoyens. C'est un exemple d'un modèle de comportement qui suggère que la Russie continuera à cibler les voix de l'opposition et les personnes qu'il juge menaçantes.

Le Canada n'a cessé de condamner ce dernier exemple de mépris des droits de la personne et du droit international de la part de la Russie. En plus d'une déclaration du ministre des Affaires étrangères le 2 septembre 2020, le Canada a également rejoint les déclarations du G7 et du Conseil de l'Atlantique Nord condamnant ces actions.

Objectifs

Description

Le Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie (le Règlement) énumère neuf individus dans une nouvelle partie de l'annexe 1 existante du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie, spécifiquement pour les personnes qui ont participé à des violations flagrantes et systématiques des droits de la personne, et interdit à toute personne (individus et entités) au Canada et à tout Canadien à l'étranger de mener les activités suivantes :

Par conséquent d'être inscrit dans le règlement, et en vertu de l'application de l'alinéa 35(1)d) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, les neuf individus figurant sur la liste sont également interdits de territoire au Canada.

Élaboration de la réglementation

Consultation

Affaires mondiales Canada mobilise régulièrement les intervenants pertinents, notamment des organisations de la société civile et des communautés culturelles ainsi que d'autres gouvernements aux vues similaires, au sujet de l'approche adoptée par le Canada quant à la mise en œuvre de sanctions.

Pour ce qui est de la présente proposition, il n'aurait pas été approprié de tenir des consultations publiques, puisque la diffusion des noms des personnes figurant sur la liste et visées par les sanctions aurait probablement entraîné la fuite de biens avant l'entrée en vigueur du Règlement.

Obligations relatives aux traités modernes et consultation et mobilisation des Autochtones

Une évaluation initiale de la portée géographique de l'initiative a été effectuée et n'a révélé aucune obligation découlant des traités modernes, car le Règlement ne prend pas effet dans une région visée par un traité moderne.

Choix de l'instrument

Au Canada, le règlement constitue le seul instrument permettant d'appliquer des sanctions. Aucun autre instrument ne pourrait être pris en compte.

Analyse de la réglementation

Avantages et coûts

L'application des sanctions servira à faire pression sur le gouvernement de la Russie afin qu'il modifie son comportement. Les sanctions communiquent un message clair indiquant que le Canada n'acceptera pas que des violations flagrantes et systématiques des droits de la personne continuent à se produire en Russie aux mains de l'État en toute impunité. Étant donné que les efforts déployés jusqu'à présent, notamment l'engagement diplomatique à la fois bilatéralement et dans les forums multilatéraux, n'ont pas convaincu le gouvernement de la Russie d'accepter la responsabilité à l'égard des violations des droits de la personne, les sanctions envoient un message important de la part du Canada que des conséquences s'appliqueront.

Les banques et les institutions financières canadiennes sont tenues de se conformer aux sanctions. Elles le feront en ajoutant les nouvelles interdictions à leurs systèmes de surveillance existants, ce qui pourrait entraîner un coût mineur de mise en conformité.

Lentille des petites entreprises

Comme il est peu probable que les entreprises canadiennes aient des relations d'affaires avec les nouvelles personnes visées par des sanctions, on ne s'attend pas à ce que le Règlement entraîne une perte importante d'opportunités pour les petites entreprises.

Afin d'aider les petites entreprises à se conformer au Règlement, Affaires mondiales Canada a entrepris de sensibiliser davantage les intervenants en les informant sur les modifications apportées, notamment par des mises à jour du site Web au sujet des sanctions et par la mise en place d'une ligne d'assistance téléphonique sur les sanctions. En outre, le Service des délégués commerciaux est engagé dans la mise en œuvre de la stratégie de diversification du commerce du Canada, qui aidera les entreprises canadiennes à trouver d'autres marchés d'exportation.

Règle du « un pour un »

La règle du « un pour un » ne s'applique pas au Règlement, car celui-ci ne crée aucun fardeau administratif supplémentaire pour les entreprises.

Coopération et harmonisation en matière de réglementation

Bien que le Règlement ne soit pas lié à un plan de travail ni à un engagement pris dans le cadre d'un forum officiel de coopération en matière de réglementation, il s'harmonise avec les mesures prises par des partenaires aux vues similaires.

Évaluation environnementale stratégique

Il est peu probable que le Règlement entraîne des effets importants sur l'environnement. Conformément à la Directive du Cabinet sur l'évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, une analyse préliminaire a permis de conclure qu'une évaluation environnementale stratégique n'est pas nécessaire.

Analyse comparative entre les sexes plus (ACS+)

Les modifications visent des individus précis qui sont membres du gouvernement de la Russie et/ou des personnes engagées dans des activités qui contribuent aux violations des droits de la personne en Russie, plutôt que de viser la Russie dans son ensemble. Cela permet de minimiser les effets collatéraux pour les personnes qui dépendent de ces individus.

Des dérogations sont incluses dans le Règlement, notamment pour permettre l'acheminement de l'aide humanitaire afin d'atténuer dans une certaine mesure l'impact des sanctions sur les groupes vulnérables. Le ministre des Affaires étrangères peut également fournir un permis en vertu du Décret concernant l'autorisation, par permis, à procéder à certaines opérations (mesures économiques spéciales - Russie). En tant que telles, ces nouvelles sanctions sont susceptibles d'avoir très peu d'impact sur les citoyens de la Russie.

Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service

Au Canada, les règlements de sanctions sont appliqués par la Gendarmerie royale du Canada et l'Agence des services frontaliers du Canada. Conformément à l'article 8 de la Loi sur les mesures économiques spéciales, quiconque contrevient délibérément au Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie est passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d'une amende maximale de 25 000 $ ou d'une peine d'emprisonnement maximale d'un an, ou des deux; ou encore, sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, d'une peine d'emprisonnement maximale de cinq ans.

Personne-ressource

Alison Grant
Directrice
Direction des relations avec l'Eurasie et l'Europe de l'Est
Téléphone : 343‑203‑3603
Courriel : alison.grant@international.gc.ca