Décret d'extension no 3 (Loi sur la protection des renseignements personnels) : DORS/2021-174
La Gazette du Canada, Partie II, volume 155, numéro 15
Enregistrement
DORS/2021-174 Le 14 juillet 2021
LOI SUR LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS
C.P. 2021-725 Le 13 juillet 2021
Sur recommandation du ministre de la Justice et en vertu du paragraphe 12(3) de la Loi sur la protection des renseignements personnels référence a, Son Excellence l'administrateur du gouvernement du Canada en conseil prend le Décret d'extension no 3 (Loi sur la protection des renseignements personnels), ci-après.
Décret d'extension no 3 (Loi sur la protection des renseignements personnels)
Extension du droit d'accès
1 Le droit d'accès aux renseignements personnels que prévoit le paragraphe 12(1) de la Loi sur la protection des renseignements personnels est étendu à tout individu à l'étranger qui ne bénéficie pas déjà de ce droit.
Entrée en vigueur
2 Le présent décret entre en vigueur au premier anniversaire de sa prise.
RÉSUMÉ DE L'ÉTUDE D'IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION
(Le présent résumé ne fait pas partie du Décret.)
Enjeux
Le droit d'accéder à ses renseignements personnels en vertu du paragraphe 12(1) de la Loi sur la protection des renseignements personnels (LPRP) n'est pas universel et ne concorde donc pas avec les normes nationales et internationales.
Contexte
La LPRP confère aux individus le droit d'accéder aux renseignements personnels dont les institutions fédérales disposent à leur sujet. Aux termes du paragraphe 12(1), ce droit s'applique aux citoyens et aux résidents permanents du Canada. Des droits de recours, notamment le droit de demander la correction de ses renseignements personnels, sont prévus au paragraphe 12(2) de la LPRP et découlent du droit d'accès établi par le paragraphe 12(1).
Le droit d'accès prévu par la LPRP peut être élargi au moyen d'un décret d'extension pris en vertu du paragraphe 12(3) de la Loi. En 1983, le Décret d'extension no 1 (Loi sur la protection des renseignements personnels) a étendu ce droit aux détenus des pénitenciers fédéraux qui ne sont ni citoyens canadiens ni résidents permanents, et en 1989, le Décret d'extension no 2 (Loi sur la protection des renseignements personnels) l'a étendu à tout individu présent au Canada qui ne bénéficiait pas déjà de ce droit.
D'ici à l'entrée en vigueur du Décret d'extension no 3 (Loi sur la protection des renseignements personnels) [le Décret] seuls les citoyens canadiens et les résidents permanents (peu importe où ils se trouvent physiquement) et les individus se trouvant physiquement au Canada auront le droit d'accéder à leurs renseignements personnels en vertu de la LPRP. Les ressortissants étrangers qui ne se trouvent pas physiquement au Canada ne disposeront pas de ce droit.
La LPRP est hors norme à cet égard. Les lois provinciales et territoriales d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels applicables au secteur public prévoient un droit d'accès sans restriction géographique. C'est aussi le cas au Royaume-Uni et dans la plupart des autres ressorts du Commonwealth, tout comme en vertu du Règlement général sur la protection des données de l'Union européenne. L'accès universel aux renseignements personnels, peu importe l'emplacement géographique de l'individu, est la norme à l'échelle nationale et internationale.
Les institutions fédérales détiennent des renseignements personnels tant sur les ressortissants étrangers que sur les citoyens canadiens. Étant donné les restrictions au droit d'accès prévues par la LPRP, les ressortissants étrangers qui souhaitent accéder à leurs renseignements personnels, par exemple relativement à une demande de visa de travail ou d'étude ou à une demande d'immigration au Canada, doivent souvent charger un mandataire de faire la demande de renseignements au titre de la Loi sur l'accès à l'information, moyennant souvent des frais, puis consentir à la divulgation de leurs renseignements personnels à ce mandataire.
Le Commissaire à la protection de la vie privée du Canada recommande depuis longtemps que le droit d'accès prévu par la LPRP soit universel. De même, le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes a recommandé en 2016 que le gouvernement du Canada envisage d'étendre aux ressortissants étrangers le droit d'accès aux renseignements personnels.
Objectif
Le Décret accorde aux ressortissants étrangers le même droit que celui dont dispose les ressortissants canadiens de demander de se faire communiquer les renseignements personnels les concernant et relevant d'institutions fédérales. Les ressortissants étrangers seront donc en mesure de déterminer directement comment leurs renseignements personnels sont utilisés, et de prendre des mesures pour faire corriger toute inexactitude dans ces renseignements. Il en découle un accroissement de la transparence, de l'équité et de la responsabilité.
Le Décret étend le droit d'accès prévu par la LPRP de façon à le rendre universel, ce qui fera du même coup concorder la LPRP avec les normes nationales et internationales en la matière. Il améliore l'interopérabilité, particulièrement avec les États membres de l'Union européenne.
Description
Le Décret permet aux ressortissants étrangers, quel que soit l'endroit où ils se trouvent, de demander l'accès aux renseignements personnels dont les institutions fédérales disposent à leur sujet en vertu de la LPRP.
Élaboration de la réglementation
Consultation
Le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada (SCT) a été consulté sur la proposition, puisque le président du Conseil du Trésor est le ministre désigné pour l'administration de la LPRP, ce qui inclut la responsabilité d'élaborer des politiques et des lignes directrices, d'administrer le Service de demande d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels en ligne (SDAL), de recueillir des statistiques et d'encourager les institutions fédérales visées à respecter la LPRP.
Le ministère de la Justice a aussi consulté des ministères et organismes qu'il anticipe être parmi les plus touchés par le Décret, y compris Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC). Il est à prévoir que l'entrée en vigueur du Décret aura une incidence opérationnelle considérable pour IRCC, étant donné que la majorité de sa clientèle est constituée de ressortissants étrangers. Dans l'ensemble, les institutions fédérales sont favorables au Décret, bien qu'elles anticipent un certain niveau d'impacts opérationnels.
On ne s'attend pas à ce que le Décret ait des conséquences pour les droits des Canadiens et des Canadiennes ou à ce qu'il accroisse le fardeau administratif ou les coûts pour les entreprises. Il ne fait qu'étendre aux ressortissants étrangers le droit d'accès prévu par la LPRP, peu importe leur emplacement géographique, pour leur conférer le même droit que celui dont disposent les ressortissants canadiens.
Obligations relatives aux traités modernes et consultation et mobilisation des Autochtones
On ne prévoit aucune incidence sur les traités modernes, car les peuples autochtones du Canada ne sont pas touchés par le Décret.
Choix de l'instrument
Le droit d'accès prévu par le paragraphe 12(1) la LPRP pouvait être élargi au moyen d'une modification législative ou par la prise d'un décret en vertu du paragraphe 12(3) de la Loi. L'utilisation d'un instrument réglementaire permet d'effectuer plus rapidement l'extension du droit d'accès, et cette approche a été utilisée pour les précédentes extensions au droit d'accès.
Analyse de la réglementation
Avantages et coûts
Le Décret permettra aux ressortissants étrangers, peu importe leur emplacement géographique, de demander accès aux renseignements personnels qui les concernent et relevant d'institutions fédérales.
Les ressortissants étrangers situés hors du Canada seront également en mesure de se prévaloir des droits prévus par le paragraphe 12(2) de la LPRP, tel que le droit de demander la correction de leurs renseignements personnels lorsque ceux-ci sont, selon eux, erronés ou incomplets, puisque ces droits découlent du droit d'accès aux renseignements personnels. Les ressortissants étrangers situés hors du Canada bénéficieront également du droit de porter à l'attention du Commissaire à la protection de la vie privée du Canada les questions découlant de l'exercice de leur droit d'accès aux renseignements personnels et de tout autre droit prévu par le paragraphe 12(2).
Étendre l'accès universel aux fonds de renseignements personnels rapproche le régime canadien de protection des renseignements personnels de ceux d'importants partenaires commerciaux, tels que l'Union européenne et le Royaume-Uni. Cet alignement facilitera le transfert de renseignements personnels entre les entreprises établies au Canada et celles établies dans ces régions.
Il est anticipé que le Décret mène à une augmentation variable du nombre de demandes d'accès aux renseignements personnels pour les ministères et agences fédéraux assujetties à la LPRP. Il est anticipé que l'augmentation la plus marquée affectera IRCC.
IRCC reçoit plus de demandes d'accès à l'information et aux renseignements personnels que l'ensemble des autres institutions fédérales réunies — la plupart étant liées à des dossiers individuels. Durant l'année fiscale 2020-2021, IRCC a reçu près de 130 000 demandes d'accès à l'information et aux renseignements personnels. Il est anticipé que le Décret donnera lieu à une augmentation significative du nombre total de demandes de renseignements personnels reçues, dû en grande partie à un changement dans la nature des demandes reçues.
Près de 99 % des demandes soumises à IRCC visent la communication de renseignements personnels, mais la majorité de ces demandes ne sont pas effectuées directement par les clients d'IRCC, puisque ceux-ci n'ont jusqu'à présent pas bénéficié du droit d'effectuer de telles demandes en vertu de la LPRP. Ces demandes sont plutôt effectuées par des tierces parties en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, moyennant souvent des frais. Une fois que le Décret entrera en vigueur, on prévoit qu'une partie importante du volume de demandes reçues par IRCC sera désormais faite en vertu de la LPRP, au lieu de la Loi sur l'accès à l'information. Les demandes d'accès fondées sur la LPRP sont assorties de délais de réponse obligatoires et la possibilité de leur prolongation est plus limitée qu'en vertu du régime de la Loi sur l'accès à l'information, ce qui est susceptible d'avoir une incidence pour les opérations d'IRCC.
Les ministères et agences fédérales assujettis à la LPRP assumeront des coûts découlant du traitement des demandes additionnelles. Le SCT assumera les coûts reliés à la mise à jour du SDAL et des instruments de politiques, tels que le Formulaire de demande d'accès à des renseignements personnels et les formulaires statistiques, de manière à ce qu'ils soient conformes avec le Décret d'ici à son entrée en vigueur. Une fois que le Décret sera entré en vigueur, des coûts supplémentaires et récurrents sont à prévoir afin d'entretenir le SDAL de manière à accommoder l'augmentation des demandes faites par des ressortissants étrangers par le biais de ce système, tout dépendant de l'importance de l'augmentation de ce nombre.
Lentille des petites entreprises
L'analyse réalisée en vertu de la lentille des petites entreprises a démontré que le Décret n'aura pas d'incidence pour les petites entreprises canadiennes.
Règle du « un pour un »
La règle du « un pour un » ne s'applique pas, car le Décret ne donnera lieu à aucun changement marginal pour le fardeau administratif des entreprises.
Coopération et harmonisation en matière de réglementation
Le Décret n'est pas lié à un plan de travail ou à un engagement découlant d'un forum officiel sur la coopération en matière de réglementation.
Cependant, le Décret étendra le droit d'accès prévu par la LPRP de façon à le rendre universel, ce qui fera concorder la LPRP avec les normes nationales et internationales en la matière.
Évaluation environnementale stratégique
Conformément à la Directive du Cabinet sur l'évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, une analyse préliminaire a conclu qu'une évaluation environnementale stratégique n'est pas nécessaire.
Analyse comparative entre les sexes plus (ACS+)
Le Décret profitera aux ressortissants étrangers qui ne se trouvent pas au Canada, et plus particulièrement ceux qui n'ont pas les moyens de payer un tiers afin d'obtenir accès à leurs renseignements personnels par le biais de la Loi sur l'accès à l'information.
Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service
Le Décret entrera en vigueur au premier anniversaire de sa prise.
Un travail de collaboration est en cours avec le SCT, afin d'assurer une mise en œuvre efficace et efficiente. Avant l'entrée en vigueur du Décret, le SCT mettra à jour le SDAL, le Formulaire de demande d'accès à des renseignements personnels, les instruments de politique et les formulaires statistiques pour les adapter au Décret. De plus, le SCT soutiendra la mise en œuvre du Décret au sein de la communauté de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels grâce à l'élaboration de lignes directrices portant sur le traitement des demandes de renseignements personnels faites par des ressortissants étrangers, et le SCT communiquera directement avec les institutions fédérales afin de les préparer à la modification du droit d'accès au titre de la LPRP.
Des travaux sont en cours pour qu'IRCC étende, de manière proactive, l'accès aux renseignements personnels, ce qui devrait éviter à ses clients de devoir demander l'accès par le biais du régime de la LPRP. Cependant, on estime que certaines initiatives prendront un à deux ans à mettre en œuvre, car elles dépendent de solutions numériques. On s'attend donc à ce qu'IRCC mette en place des solutions intérimaires. Ceci inclut la mise à jour de ses systèmes afin qu'ils supportent des niveaux accrus de demandes de renseignements personnels, et aussi d'embaucher, de former et d'équiper du personnel supplémentaire pour répondre à toute hausse des demandes de renseignements personnels qu'entraînera l'élargissement des droits d'accès.
Les institutions fédérales devront respecter les normes de service prévues par la LPRP, y compris celles concernant les délais de réponse aux demandes de communication de renseignements personnels.
La Loi sur la protection des renseignements personnels prévoit, et le Commissaire à la protection de la vie privée du Canada, un mécanisme indépendant d'examen des plaintes portant sur l'exercice des droits des requérants en vertu de la Loi. Ce mécanisme inclut l'enquête, par le Commissaire à la protection de la vie privée du Canada, portant sur toute question touchant à l'accès aux renseignements personnels et au droit d'intenter un recours en révision judiciaire en lien avec le refus de donner accès aux renseignements personnels.
Pour ce qui est de la surveillance du rendement et de l'établissement de rapports à ce sujet, la Loi sur la protection des renseignements personnels exige que le responsable de toute institution fédérale présente au Parlement un rapport annuel sur l'administration de cette loi au sein de son institution.
Personne-ressource
Carolina Mingarelli
Directrice et avocate générale
Centre du droit à l'information et à la protection des renseignements personnels
Ministère de la Justice
284, rue Wellington
Ottawa (Ontario)
K1A 0H8
Courriel : EXT3.usg@justice.gc.ca