Règlement modifiant le Règlement sur les mesures spéciales d’importation : DORS/2023-26

La Gazette du Canada, Partie II, volume 157, numéro 5

Enregistrement
DORS/2023-26 Le 15 février 2023

LOI SUR LES MESURES SPÉCIALES D’IMPORTATION

C.P. 2023-140 Le 14 février 2023

Sur recommandation de la ministre des Finances et en vertu du paragraphe 20(1)référence a et de l’alinéa 97(1)a) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation référence b, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil prend le Règlement modifiant le Règlement sur les mesures spéciales d’importation, ci-après.

Règlement modifiant le Règlement sur les mesures spéciales d’importation

Modification

1 L’article 17.1 du Règlement sur les mesures spéciales d’importation référence 1 est modifié par adjonction, après l’alinéa c), de ce qui suit :

Entrée en vigueur

2 Le présent règlement entre en vigueur à la date de son enregistrement.

RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION

(Le présent résumé ne fait pas partie du Règlement.)

Enjeux

Des décisions et rapports récents en matière de recours commerciaux du département du Commerce des États-Unis, de la Commission européenne et de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) révèlent des éléments de preuve démontrant d’importantes interventions gouvernementales et des distorsions de prix dans les économies russe et bélarusse. Étant donné que l’ASFC dispose d’une marge de manœuvre limitée pour tenir compte, dans ses enquêtes antidumping, du fait que les marchandises en provenance de la Russie et du Bélarus sont produites dans des conditions autres que celles d’une économie de marché, les droits antidumping protégeant les producteurs canadiens contre les importations faisant l’objet de dumping en provenance de ces pays sont moins susceptibles de refléter l’intégralité du dumping.

Contexte

Dans le contexte des règles commerciales de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), il y a dumping lorsque des marchandises sont vendues à un autre pays à des prix inférieurs au prix de vente de marchandises comparables dans le pays d’exportation, ou lorsque des marchandises sont vendues à un autre pays à un prix inférieur à leur coût de production. S’il est déterminé que les importations faisant l’objet de dumping causent un dommage aux activités des producteurs nationaux dans le pays importateur, le niveau de dumping peut être compensé par l’application de droits antidumping sur les marchandises importées. Les droits visent à compenser l’avantage de prix causé par le dumping et à donner aux producteurs nationaux la possibilité de concurrencer équitablement les marchandises importées.

Pour les exportations en provenance d’une économie de marché, ces droits sont normalement calculés sur la base des prix et des coûts dans le marché intérieur de l’exportateur. Dans les situations d’« économie autre que de marché » (EAM)[c’est-à-dire lorsque le gouvernement fixe, en majeure partie, les prix intérieurs de sorte qu’il y a lieu de croire que ceux-ci seraient différents dans un marché où joue la concurrence], les droits antidumping peuvent être calculés sur la base de prix et de coûts de substitution provenant d’un pays tiers dont le marché est sans distorsions.

Dans le système de recours commerciaux du Canada, les conditions d’application d’une méthode de calcul EAM sont que le président de l’ASFC forme une opinion positive selon laquelle le gouvernement du pays faisant l’objet de l’enquête : (1) exerce un monopole ou un quasi-monopole sur son commerce à l’exportation; (2) fixe, en majeure partie, les prix intérieurs de sorte qu’il y a lieu de croire que ceux-ci seraient différents dans un marché où joue la concurrence.

Toutefois, pour les pays visés à l’article 17.1 du Règlement sur les mesures spéciales d’importation (RMSI), seule la deuxième condition doit être remplie avant d’appliquer une méthode EAM pour calculer les marges de dumping. C’est actuellement le cas pour la Chine, le Tadjikistan et le Vietnam.

Le Canada a actuellement des mesures antidumping en vigueur sur les barres d’armature pour béton en provenance de la Russie et du Bélarus. La mesure sur les barres d’armature pour béton en provenance de Russie ne reflète pas une méthodologie EAM, tandis que la mesure sur les barres d’armature en béton en provenance du Bélarus est fondée sur une méthodologie EAM que l’ASFC a pu utiliser en raison d’éléments de preuve que, pour le marché des barres d’armature pour béton, le gouvernement bélarusse exerçait un quasi-monopole sur son commerce à l’exportation et fixait, en majeure partie, les prix intérieurs.

Éléments de preuve démontrant l’intervention gouvernementale

Russie

En novembre 2022, le département du Commerce des États-Unis a désigné la Russie comme pays EAM sur la base d’éléments de preuve démontrant l’expansion de l’activité gouvernementale qui a à la fois élargi et approfondi son impact sur le marché intérieur russe, en particulier depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie au début de 2022. Les conclusions du département du Commerce des États-Unis ont mis en évidence une croissance démontrable du contrôle du gouvernement russe sur l’économie, une augmentation du contrôle du gouvernement sur les prix et une détérioration des droits des travailleurs et de la liberté d’information. La décision des États-Unis a également noté que les initiatives de libéralisation antérieures de la Russie en matière de convertibilité de la monnaie et d’investissement étranger ont fait marche arrière. En conséquence, les États-Unis ont constaté que les prix et les coûts en Russie ne sont plus fixés de manière prévisible par des facteurs d’offre et de demande ayant libre cours et que les distorsions économiques qui en découlent rendent toute information sur les coûts ou les ventes qui pourrait être utilisée dans les enquêtes antidumping non représentative d’une situation de marché.

Auparavant, en octobre 2020, la Commission européenne avait publié un Rapport sur les distorsions importantes dans l’économie de la Fédération de Russie aux fins d’enquêtes en matière de défense commerciale, qui mettait en évidence un degré élevé d’intervention de l’État dans l’économie russe via la faiblesse des institutions juridiques et la force du pouvoir présidentiel, un niveau élevé de concentration de la propriété, la participation substantielle de l’État dans les grandes entreprises, le contrôle par l’État de secteurs économiques stratégiques (par exemple l’énergie, les transports, les communications, l’exploitation minière et les produits de métaux fabriqués), le contrôle accru du gouvernement sur le secteur financier par le biais des banques d’État, et les restrictions des marchés publics causées par les restrictions imposées aux entreprises étrangères, des méthodes non concurrentielles, la corruption et le manque de transparence.

Bélarus

Depuis avril 2017, le Canada impose des droits antidumping sur les importations de barres d’armature en béton en provenance du Bélarus. Dans le cadre de son enquête initiale, l’ASFC a conclu que les conditions d’application d’une méthode NME étaient remplies pour le secteur faisant l’objet d’une enquête.

En octobre 2020, le département du Commerce des États-Unis a conclu que le Bélarus était un pays EAM, sur la base du fait que son économie ne fonctionne pas principalement selon les principes du marché. Les facteurs pris en compte comprenaient : la convertibilité de la monnaie, les taux de salaire déterminés par la libre négociation avec les travailleurs, la mesure dans laquelle les co-entreprises ou autres investissements par des entreprises étrangères sont autorisés, le degré de propriété ou de contrôle du gouvernement sur les moyens de production, ainsi que le degré de contrôle du gouvernement sur l’allocation des ressources et sur les décisions des entreprises en matière de prix et de production.

Objectif

Des éléments de preuve substantiels démontrant l’omniprésence de conditions d’économie autre que de marché en Russie et au Bélarus justifient une approche selon laquelle des méthodologies EAM puissent être utilisées dans chaque enquête selon un fardeau de la preuve réduit. Les modifications facilitent cette approche en éliminant l’exigence de démontrer que ces pays ont un monopole ou un quasi-monopole sur leur commerce à l’exportation dans un secteur donné. En assurant des niveaux de protection adéquats qui reflètent les conditions de marché dans ces pays, cela atténuera le risque que des importations faisant l’objet d’un commerce déloyal en provenance de la Russie et du Bélarus entrent au Canada et causent un dommage aux producteurs nationaux.

Description

Le Règlement modifiant le Règlement sur les mesures spéciales d’importation (le Règlement) ajoute la Russie et le Bélarus à l’article 17.1 du RMSI, qui précise les pays avec lesquels l’ASFC requière un fardeau de la preuve réduit pour l’utilisation d’une méthodologie EAM aux fins du calcul des marges de dumping.

Élaboration de la réglementation

Consultation

Le Règlement est exempté de la publication préalable, car les points de vue des principaux utilisateurs du système de recours commerciaux (par exemple les producteurs d’acier nationaux) sont bien connus en raison de leur soutien aux mesures visant à renforcer le système de recours commerciaux du Canada, y compris l’ajout de pays désignés dans le passé.

Le Règlement ne devrait pas non plus soulever de préoccupations importantes de la part des importateurs, puisque la quantité d’importations canadiennes en provenance de la Russie et du Bélarus qui sont touchées par des droits antidumping est minime (Russie : en 2021, les importations de barres d’armature pour béton étaient évaluées à 215 000 $; Bélarus : aucune importation de barres d’armature pour béton depuis 2019) et la probabilité de nouvelles enquêtes concernant les importations en provenance de ces pays est faible en raison des récentes mesures commerciales contre ces pays (notamment le retrait de la préférence tarifaire de la nation la plus favorisée sur pratiquement toutes les marchandises en provenance de la Russie et du Bélarus et la fixation d’un taux tarifaire de 35 % depuis le 2 mars 2022 selon les DORS/2022-35 et DORS/2022-209). Par conséquent, il est peu probable que la publication préalable aurait fourni de nouveaux points de vue ou modifié le Règlement.

Obligations relatives aux traités modernes et consultation et mobilisation des Autochtones

Aucune incidence n’a été signalée en ce qui concerne les obligations du gouvernement relatives aux droits ancestraux protégés en vertu de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 ou les obligations issues des traités modernes et les obligations internationales concernant les droits de la personne.

Choix de l’instrument

Le Règlement modifie le RMSI. Cela n’est possible qu’au moyen d’un règlement et, par conséquent, aucun autre instrument n’a été envisagé.

Analyse de la réglementation

Avantages et coûts

Le Règlement ne devrait pas entraîner de coûts supplémentaires importants pour le gouvernement, les entreprises, les consommateurs ou les Canadiens. Bien que l’utilisation de la méthode EAM implique un travail supplémentaire pour l’ASFC afin de démontrer les distorsions de prix sur le marché étranger, les enquêtes antidumping visant des marchandises en provenance de la Russie et du Bélarus ne sont pas fréquentes (au cours des 20 dernières années, il n’y a eu que quatre mesures de recours commerciaux concernant des marchandises en provenance de la Russie et une concernant des marchandises en provenance du Bélarus).

Le Canada a actuellement des mesures antidumping en vigueur sur les barres d’armature pour béton en provenance de la Russie et du Bélarus. Le Règlement pourrait éventuellement mener à des droits antidumping plus élevés sur ces produits, ce qui représenterait un coût supplémentaire pour les importateurs de ces produits. Cela dit, le coût serait faible, car les importations canadiennes de barres d’armature pour béton en provenance de la Russie et du Bélarus sont minimes (Russie : en 2021, les importations de barres d’armature pour béton étaient évaluées à 215 000 $; Bélarus : aucune importation de barres d’armature pour béton depuis 2019). La probabilité que le Canada impose de nouvelles mesures antidumping sur des marchandises russes et bélarusses dans un avenir rapproché est également réduite par les récentes mesures commerciales prises par le Canada contre la Russie et le Bélarus, y compris l’application du tarif général de 35 % sur pratiquement toutes les marchandises importées de la Russie et du Bélarus, qui a considérablement réduit les importations en provenance de ces pays.

En ce qui a trait aux avantages, le système de recours commerciaux du Canada aura plus de souplesse pour évaluer si les secteurs industriels en Russie ou au Bélarus fonctionnent selon des conditions du marché et, si cela n’est pas le cas, offrira aux producteurs nationaux canadiens des niveaux de protection adéquats reflétant les distorsions de marché dans ces pays. Cela permettra aux fabricants canadiens de bénéficier d’une protection similaire à celle de leurs concurrents aux États-Unis et dans l’Union européenne.

Lentille des petites entreprises

L’analyse en vertu de la lentille des petites entreprises a permis de déterminer que le Règlement n’aura pas de répercussions sur les petites entreprises au Canada.

Règle du « un pour un »

La règle du « un pour un » ne s’applique pas étant donné qu’aucune modification complémentaire n’est apportée au fardeau administratif des entreprises et qu’aucun titre de règlement n’est abrogé ni introduit.

Coopération et harmonisation en matière de réglementation

Bien que les droits antidumping aient une incidence sur l’ouverture au commerce, ces mesures sont expressément autorisées par les règles de l’OMC lorsque la branche de production nationale subit un dommage causé par des importations faisant l’objet de dumping. Le Règlement alignera davantage la pratique canadienne avec celles des États-Unis et de l’Union européenne. Il s’alignera également avec la Déclaration commune sur l’agression russe et le soutien à l’Ukraine émise à l’OMC en mars 2022 et, de façon plus générale, avec la répudiation publique du Canada et de ses alliés du statut de nation la plus favorisée de la Russie à l’OMC. Conformément aux règles de l’OMC, l’OMC sera informée lorsque le Règlement sera pris.

Évaluation environnementale stratégique

Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, une analyse préliminaire a permis de conclure que le Règlement n’aura aucune répercussion positive ou négative sur l’environnement. Il n’est donc pas nécessaire d’effectuer une évaluation environnementale stratégique.

Analyse comparative entre les sexes plus

Aucune incidence liée à l’analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) n’a été relevée pour le Règlement.

Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service

Le Règlement entrera en vigueur le jour de son enregistrement. Le système de recours commerciaux du Canada est administré par l’ASFC et le Tribunal canadien du commerce extérieur. Aucun changement significatif n’est nécessaire aux procédures et processus de ces organisations.

Personne-ressource

Marie-Hélène Cantin
Division de la politique commerciale internationale
Ministère des Finances Canada
Ottawa (Ontario)
K1A 0G5
Téléphone : 343‑550‑6119